Musée Munch à OSLO - Huile sur toîle 91 X 73 cm
Le sujet et la composition:
La violence dépeinte dans cette oeuvre où le paroxisme est à son comble, est un thème nouveau en peinture; seules certaines oeuvres de Goya ont tenté auparavant de retranscrir un univers aussi virulent. Munch a raconté l'histoire de ce tableau: se promenant avec deux amis sur une route surplombant le fjord de Christina à Aasgarrdstand, petit bourg côtier de Norvège où il travaillait, il a été ébloui par le brusque changement du paysage au moment d'un soleil couchant éclatant. Il s'est arrêté, bouleversé par cette vision d'un ciel sanglant, alors que ses amis, indifférents, s'éloignaient. Il lui a semblé entendre un cri terrible, d'une rare violence et il s'est bouché les oreilles pour ne pas entendre, criant d'effroi à son tour. Les formes sont ici simplifiées à l'extrème. C'est grâce à un langage pictural dépouillé et suggestif que le peintre norvégien a réussi à traduire dans ce tableau un moment d'une extrème intensité.
Force est de reconnaître la tension qui se dégage de ce personnage, de cette bouche ouverte, de ces yeux hagards, de ce visage livide, et de ces deux mains plaquées contre les oreilles: pathétique tentative pour éviter d'entendre ce cri qui l'environne de toutes parts. Notons surtout l'aspect délibérément fantomatique du personnage principal: sa silhouette ondulée et vaporeuse, son visage émacié dont les traits cadavériques ne peuvent qu'évoquer chez le spectateur le visage de la Mort. A la suite de la disparition de plusieurs membres de sa famille, le peintre est resté obsédé par ma mort et terrifié par la maladie. Sont présentes dans "Le Cri" cette angoisse maladive et cette obsession du sang et de la mort. Ce climat de tension est accentué par la palette où le rouge du sang et du feu est largement utilisé dans le ciel. La mer évoque un gigantesque raz de marée. Il s'agit bien entendu d'un paysage purement mental dans lequel, par des lignes ondulantes et des couleurs violentes, Munch a exprimé son angoisse et la vision désespérée qu'il avait du monde.