Revenons quelques instants sur la maison réalisée au pastel sec sur isorel dont je vous parlais hier...
Dans un premier temps il faut trouver "l'endroit d'accueil", c'est à dire le regard que poserait le quidam qui se promène sur la route, l'angle à partir duquel la
maison offre la part la plus belle de son histoire.
Il faut ensuite, le chevalet posé, s'autoriser une ballade visuelle des abords; sentir déjà en soi les dénivellations du terrain pour mieux retrouver le trajet qu'empruntent (taient) chaque
jour les habitants, laisser son regard vagabonder pami les masses, les zones et les détails de couleurs; Nous n'en sommes qu'au repérage sensible des alentours...
Et la maison se dresse enfin parmi cette énergie sensuelle déjà bien consommée.
Le bâtonnet de pastel à la main (le blanc généralement) je commence la construction du dessin; la maison se monte tandis qu'avec les autres couleurs, je refais en arrière succintement et
très légèrement le récit coloré de ma ballade visuelle des abords...
A ce moment là l'esquisse en est précise.
Reste à donner une vie à tout celà...
Commencent alors d'incessants aller-retours pout tenter de comprendre, de ressentir, de caresser les différentes matières; gratter le mur de la maison, se cogner au poteau du
portail, ressentir la végétation quand elle est douce, parfois piquante; les couleurs s'estompent et se découvrent au rythme de ce jeu des sens...
Et le ciel dans tout çà ? Il sert de répis momentanés à cette cavalcade des sens... Il ne sait pas encore qu'il jouera un rôle primordial pour la profondeur de l'oeuvre terminée.
Et la maison qui revient sans cesse sous les doigts; l'imagination entre alors dans la ronde, car il faut en percer les mystères; qu'y-a-t-il derrière ces fenêtres, comment
franchir cette porte fermée face à ma propre histoire. Il est très difficile de tout décomposer pour tenter d'expliquer; je pense que ce sont les reflets, derrière ou contre les vitres, qui
provoquent les réminiscenses de ma propre vie; A ce stade je suis plus en mesure de raconter ce qui se passe en moi. Les couleurs se posent, je sais que j'épprouve du plaisir certainement
plus voyant que voyeur...
A un moment donné, tout me semble dit... Je repose mes pastels...
La maison a fortement plu à la personne qui me l'avait commandée.
Parfois je regarde mon dessin, je reconnais la maison, d'autres fois elle ne me parle pas...
Peut-être est-ce la pudeur contenue qui a plu...
Il est vrai que je ne suis jamais rentré dans cette maison...